Quand il s’agit d’investir dans l’immobilier, créer des espaces de coliving n’est pas dans le top-list des acheteurs.
Nous comprenons les raisons – c’est un concept venant des États-Unis, encore flou pour certains et qui ne semble pas aussi attrayant qu’une location longue durée ou un bail commercial.
Pourtant, depuis la crise sanitaire et les bouleversements qu’elle a entraînés, il y a un changement majeur en ce qui concerne, où, quand et comment nous travaillons.
C’est-à-dire qu’un jeune travailleur ne cherche plus de la sédentarité mais plutôt de la mobilité / flexibilité dans son quotidien. Sans compter qu’un logement individuel devient cher et que la concurrence est rude dans les villes étudiantes.
Ainsi, crée des espaces de coliving semble une alternative intéressante qui conviendrait aux besoins changeants des locataires tout en donnant à l’investisseur la création d’un projet qui dépasse le simple achat immobilier.
Et pour vous expliquer cela, nous avons interrogé Daniel, créateur d’un coliving à la Roche-sur-Yon.
LA DÉFINITION EXACTE D’UN COLIVING
Avant de rentrer plus en détail dans la création de votre coliving, prenons quelques minutes pour le définir.
Le coliving étant un concept venant des États-Unis, sa définition reste encore floue dans l’hexagone avec en autres des ambiguïtés par rapport à la colocation (j’y reviens juste après).
Du coup, je vous laisse avec une définition qui englobe l’essentiel du coliving :
“Le coliving est un concept de vie communautaire dans laquelle les locataires ont une chambre privée (avec salle de bains) dans une maison meublée avec des espaces communs partagés. Ils peuvent louer la chambre de façon flexible (baux à court terme ou flexibles) et à des prix plus raisonnables tout en bénéficiant des services de nettoyage et autres services clés en main.”
Mais certains coliving vont encore plus loin dans les services – ce qui marque une vraie différence avec une colocation.
Quelle est la différence entre un coliving et une colocation ?
Mais du coup, elle se trouve où cette différence ?
Même s’il semble exister des similitudes entre coliving et colocation (par exemple vivre avec d’autres personnes) l’approche est totalement différente.
Premièrement, le principe du coliving est d’avoir un vrai espace privé, allant d’une chambre avec salle de bains, jusqu’à un studio complet.
Deuxièmement, les services inclus font partie des plus de ce mode de vie : évènements privés, conciergerie, salle de sport .. Certains coliving proposent des avantages qui vont au-delà d’un simple accès à la wifi en fibre optique.
Troisièmement, la colocation s’inscrit davantage sur le long terme (partage du bail) avec parfois une clause de solidarité en cas d’impayés contrairement au coliving où un locataire peut loger entre 1 à 10 mois.
Enfin, les zones communes de certains coliving n’ont pas grand-chose à voir avec la cuisine et le salon d’une colocation classique : espace de coworking, café, restaurant, rooftop …
J’en ai fait moi-même l’expérience en visitant le coliving Selina à Lisbonne – nous sommes plus proches d’un hôtel haut de gamme qu’une colocation entre inconnus.
Des profils de locataires variés
Si vous pensiez qu’un coliving était une pratique à la mode pour les digital nomad seulement, détrompez-vous.
En échangeant avec Daniel, j’ai découvert que son projet permettait à toutes les générations de se retrouver :
“Nous avons des jeunes actifs comme des moins jeunes actifs. Dernièrement, nous avons eu un commerçant de 50 ans qui cherchait à se rapprocher de la ville, une jeune femme de 27 ans qui venait d’être embauché dans la région ainsi qu’une digital nomad qui cherchait à vivre en communauté. Leur point commun étant d’éviter l’isolement.”
Parfois, il accueille aussi un étudiant sur quelques mois le temps qu’il puisse trouver un logement dans un marché de la location tendu.
Finalement, trois profils se distinguent en coliving :
- Le Coliving : une colocation à destination des jeunes actifs
Quand on rentre sur le marché du travail, devenir locataire peut être la croix et la bannière.
D’un côté, l’offre et la demande sont en sa défaveur, de l’autre, son profil peut freiner certains propriétaires.
Du coup, créer un coliving et le mettre en location pour des jeunes actifs qui cherchent à s’émanciper est une option viable pour l’investisseur.
- Le Coliving à destination des étudiants
Cherchant à vivre à Aix-en-Provence, je vois une quantité astronomique d’annonces Facebook d’étudiants désespérés de ne pas trouver de logement.
Rien d’étonnant quand selon l’INSEE, une ville compte en moyenne 115 étudiants pour 100 logements à leurs dispositions.
Une pénurie qui complique l’installation de ces jeunes qui n’ont pas toujours l’argent ni les parents pour les soutenir.
Créer un coliving destiné aux étudiants leur permettrait de s’installer sereinement pour poursuivre leurs études.
- Le Coliving à destination des séniors
C’est sans doute le profil qu’on attend le moins en coliving et pourtant les seniors sont en demande d’une vie en communauté.
En même temps, quand on regarde la province d’Okinawa au Japon, la vie à plusieurs quand on est âgé semble être la recette pour vivre plus épanouie.
Entraide, valeurs, partage … Si vous cherchez à créer un coliving pour le mettre en location ne rejetez pas les profils seniors.
Comme me l’a dit Daniel, “mélanger les générations participe à l’harmonie d’un coliving”.
Quelles sont les règles juridiques qui encadrent un coliving ?
L’une des raisons pour lesquelles nous avons voulu interroger Daniel sur sa création, c’est pour son retour d’expérience d’un point de vue juridique.
Car le coliving est à la croisée des chemins entre différents cadres.
D’un côté, il ne s’agit pas d’un bail de location courte durée, type meublé de tourisme, mais une location à l’année classique (il est possible de loger plusieurs mois) définie par la loi du 24 mars 2014, dite loi ALUR.
De l’autre, certains services comme le ménage, l’accueil en personne lors de l’arrivée (et lors de l’état des lieux), ainsi que la fourniture de linge de maison, constituent des prestations para-hôtelières, avec une réglementation bien spécifique, et l’intégration de la TVA dans les loyers.
Il y a aussi les règles, responsabilités et devoirs qui entourent la dégradation de l’habitation ou encore le dépôt de garantie. Sans compter l’urbanisme qui dicte des règles spécifiques dans la construction / rénovation d’un bâtiment.
Du coup, j’ai posé la question à Daniel qui m’a répondu en deux étapes.
Premièrement, “faites-vous accompagner par un huissier de justice. Peu d’investisseurs le savent, mais ils sont autorisés à réaliser des états de lieux ou à créer des contrats de locations, ce qui garantit une présence éthique pour les deux parties.”
Deuxièmement, “rapprochez-vous de la ville où vous voulez créer votre coliving. Faites-vous connaître et surtout posez des questions car chaque ville à ses propres règles. Par exemple, certaines vont imposer une taxe de séjour sur votre coliving.”
Aussi, l’office du tourisme et de l’urbanisme sont des endroits où il faut se rendre pour avoir toutes les clés de lecture dans la création de votre coliving.
Enfin, Daniel a insisté sur le fait de bien distinguer le légal du fiscal avec une question essentielle à se poser : “Qu’est-ce qui est concerné par ma question ?”.
Créer un coliving en partant zéro : les 1ères questions à se poser
Lorsqu’on veut créer un coliving et le mettre en location, il y a des questions indispensables à se poser.
Certaines viendront lors du processus de construction du projet, quand d’autres doivent être répondues dès maintenant pour comprendre s’il est pertinent pour vous d’investir dans un coliving.
Du coup, avec l’équipe Mellonia, nous avons décidé de nous concentrer sur quatre thématiques :
- Coût d’investissement
- Choix juridique et fiscal
- Les types de biens à acheter
- Puis-je emprunter à la banque ?
Tout cela en se mettant dans la peau d’un investisseur novice.
Une mise de départ importante
Depuis la crise sanitaire et l’exode de nombreux citadins pour la campagne, il est impossible de nier l’augmentation significative du prix d’un bien immobilier.
Par exemple, certaines villes en Bretagne ont vu leur montant de vente multiplié par deux, avec parfois des travaux conséquents pour créer un “chez soi”.
Du coup, entre la ville aux m2 déjà onéreux et la campagne qui suit le même chemin, j’ai fait le curieux en demandant à Daniel le coût d’investissement global (achat & travaux) de son coliving à La Roche-sur-Yon.
“550 000 euros en enveloppe globale. Ce montant comprend l’achat, la rénovation complète de l’habitat, avec une salle de bains pour chaque chambre et un aménagement de standing pour accueillir les locataires convenablement.”
Un budget qu’il considère comme “cohérent” même s’il conçoit qu’il est possible de construire un coliving moins cher, en faisant ses travaux soi-même ou en aménageant l’espace avec des matériaux de moins bonne qualité.
Mais on y reviendra plus tard dans l’article, cette approche à “l’euros près” n’est pas forcément la bonne vis-à-vis des locataires que l’on veut attirer.
Créer un coliving en nom propre, en société ou les deux ?
Lorsqu’on parle d’investissement immobilier, il y a une abréviation qui revient souvent – la SCI (société civile immobilière). Une société qui permet une optimisation fiscale et juridique de son parc immobilier.
Mais la SCI n’est pas la seule possibilité ; vous pouvez créer une SAS immobilière, une SARL ou simplement acheter en nom propre.
BON À SAVOIR
Si ces abréviations vous semblent encore barbares, l’équipe de Mellonia Academy prépare des articles complets pour vulgariser ces sociétés – chacune ayant ses spécificités qu’il est intéressant de maîtriser.
Du coup, entre toutes ses possibilités, laquelle choisir ?
Dans le cas précis de l’investissement immobilier, Daniel me rappelle l’importance de se projeter par rapport à ses futurs besoins et non de choisir un statut pour “éviter les impôts. Car dans tous les cas, vous paierez des impôts”.
Par contre, une projection de vos investissements dans 10 ou 20 ans permet de choisir la bonne société ; car créer un coliving ne demande pas le même montage qu’en avoir cinq.
Alors, si vos désirs se limitent à la création d’un coliving, commencez en nom propre. Par contre, si vous projetez d’en acheter cinq, rapprochez-vous d’un expert-comptable (spécialisé dans l’investissement immobilier) pour regarder les meilleures options selon votre profil.
Les types de biens les plus adaptés au coliving (et où les trouver ?)
Nous en parlions en introduction, le marché immobilier est tendu depuis la crise sanitaire.
Les biens immobiliers sont rares, les prix sont élevés et les banques frileuses … Du coup, comment s’assurer un rendement correct sur votre projet lorsque toutes les lumières sont dans le rouge ?
Nous avons deux pistes d’explorations pour vous.
Viser les biens immobiliers en campagne (environ 2000 euros / m2) ET avec du terrain.
Même si les Français sont friands de jardinage depuis le confinement, il semblerait que les biens avec des superficies de 700-1000m2 de jardin soient plus difficiles à vendre qu’un terrain de 300m2.
Les raisons sont doubles :
- Plus de terrain = coût d’achat plus élevé
- Plus de terrain = plus d’entretien.
Cependant, un terrain vaste permet une chose pour l’investisseur– une division du bien.
En ce moment, j’écris cet article depuis mon village natal où je rends visite à ma famille. Une de mes activités préférées est de me balader pour découvrir les changements ; nouvelles maisons, nouvel aménagement, etc.
Honnêtement, je suis toujours surpris par le nombre de maisons qui se construisent accolées entre elles, juxtaposant les trottoirs, ne laissant plus un m2 de disponible.
Et l’histoire est toujours la même : “X a vendu son terrain à X car il ne l’utilisait pas”.
Du coup, ne négligez pas ces biens avec du terrain car une fois en votre possession il est possible de maximiser vos revenus avec 2ème coliving par exemple..
Nouer des relations avec des agents immobiliers
“Je suis abasourdi par le nombre de collègues investisseurs qui viennent me voir et me disent : comment fais-tu pour avoir autant de biens qui te sont proposés ? Ma réponse reste la même : nous avons suivi la même formation, comment fais-tu pour ne pas trouver de biens?”
Daniel Cossard
Qu’est-ce qui fait qu’un investisseur se bat avec des miettes sur Leboncoin quand un autre reçoit 10 appels / semaine pour des biens qui n’existent même pas encore sur le marché ?
La réponse se trouve dans les relations et la posture qu’à un investisseur lorsqu’il franchit les portes d’une agence immobilière.
Que vous achetiez une baguette de pain, une voiture ou un bien immobilier, il s’agit avant tout d’une transaction entre deux humains. Il est donc important de considérer l’agence comme un partenaire de votre projet et non comme un intermédiaire.
Mais créer une relation ne suffit pas.
L’agence immobilière étant là pour vendre ses services, il est important que “chaque investisseur porte une casquette du professionnel de l’immobilier”.
Concrètement, il s’agit d’une posture qui montre à l’agent que vous savez dans quoi vous vous embarquez : “je suis là pour générer de l’argent, acheter des biens”.
BON À SAVOIR
Pour adopter le bon mindset de l’investisseur immobilier, on a écrit un article pour vous.
Ces conseils paraissent logiques lorsqu’on a de l’expérience dans l’immobilier, pourtant il semblerait qu’un nombre d’investisseurs oublient cette partie relationnelle. Ce qui les empêche justement d’accéder à des biens encore inexistants sur le marché.
Et la banque dans tout cela ?
Enfin, un projet immobilier ne se concrétise que rarement sans l’aide d’une banque.
À ce sujet, Daniel revient à l’essence même des relations humaines : “tu peux avoir le meilleur projet du monde, avoir une rentabilité à 15%, si ton banquier ne croit pas en toi, jamais il ne défendra ton projet auprès de sa banque.”
Pour appuyer ses propos, il me partage une anecdote.
“Pour la création d’un coliving, je suis allé voir un courtier qui rêvait de monter le même projet sans vraiment savoir faire. Du coup, il était réticent à défendre mon dossier. Nous sommes allés dîner ensemble. J’ai répondu à toutes ses questions pour qu’ils puissent créer son coliving. Quelques semaines plus tard, mon dossier était accepté.”
L’investissement est avant tout de la psychologie ; il y a l’humain, la capacité à se vendre, donner pour recevoir et surtout l’inclusion du banquier dans son projet.
Car comme le rappelle Daniel, ce dernier n’est pas toujours un investisseur. Pour un banquier qui vit à la campagne, “une rentabilité à 10% qui permet de générer son salaire mensuel paraît lunaire”. Du coup, il faut choisir les bons mots et vendre le projet comme étant aussi le sien.
Vous ne savez pas comment préparer un dossier bancaire ?
Hugo a écrit un article complet à ce sujet.
Enfin, il est important d’ouvrir toutes les portes, qu’ils s’agissent de la même banque dans la région ou de banquiers dans la même banque.
“Pour mon 1er projet locatif, j’ai cogné à 50 banques différentes. J’ai même parcouru l’annuaire à la recherche de banques en Suisse ou en Belgique. Si je m’étais arrêté à la 49ème, je n’en serais pas là actuellement.”
Mettre en location son coliving et en tirer un maximum de revenus
À ce stade de l’article, vous êtes peut-être en train de réfléchir à créer votre coliving et le mettre en location.
Nous pourrions nous arrêter là mais ça serait construire un puzzle sans y mettre la dernière pièce – la mise en location pour en tirer le maximum de revenus (avec en ligne de mire, 10% de rentabilité).
Réfléchir comme une entreprise
Créer un coliving et le mettre en location va plus loin qu’un simple achat ; c’est une approche, une philosophie.
Dès le départ, il faut imaginer votre coliving comme une entreprise avec ses valeurs, sa mission et une identité forte pour attirer les locataires qui vous correspondent.
Par exemple, le coliving de la Robretières a fait le choix d’intégrer une valeur éco-responsable en faisant de chaque locataire parrain d’un arbre avec l’association “ChaîneDeVie” et en intégrant un composteur dans le jardin. Le but étant d’accorder les locataires autour d’une valeur commune – l’écologie.
BON À SAVOIR
D’ailleurs, nous vous laissons jeter un coup à la philosophie et aux actions de ce coliving en cliquant ici.
Globalement, nous vous conseillons de créer toute une stratégie marketing et de communication qui pourrait inclure, par exemple, la création d’un média (newsletter, blog, chaîne Youtube).
De ce fait, rapprochez-vous de personnes compétentes ou formez-vous à ces métiers car un projet sans communication est un projet voué à rester dans l’ombre.
Ce qui n’est pas bon pour maximiser vos revenus.
Testez pendant que vous créez
Il existe une approche entrepreneuriale qui nous vient directement des États-Unis et qui s’appelle le “Build in Public”.
Concrètement, il s’agit de partager l’évolution d’un projet sur les réseaux sociaux mais aussi de co-construire son produit avec une audience ; c’est-à-dire de prendre en considération leurs besoins, avis et retours pour créer LE produit “parfait”.
À ce stade de votre projet, vous n’avez ni audience, ni public et sans doute ni maison.
Du coup, comment être sûr que le coliving en création répond aux besoins / attentes de vos futurs locataires ?
Daniel nous partage une dernière astuce à ce sujet.
“Mettez une annonce sur LeBonCoin sans photo avec un descriptif de votre projet et soyez franc avec les personnes qui vous appelleront.”
Ainsi, vous testez le marché et interrogez les éventuels prospects sur leurs besoins – une sorte d’enquête où vous collectez le maximum d’informations pour affiner la création de votre coliving.
Ne pas lésiner sur la qualité
Enfin, ne prenez pas un raccourci en créant un coliving nivelé vers le bas.
En faisant mes recherches, je suis tombé sur des annonces de piètre qualité où je sentais que le propriétaire y mettait le minimum d’effort. Même si le prix semble plus attractif, nous sommes loin de l’esprit de ce que devrait être un coliving.
Notre conseil : parier sur le haut du panier.
Plus vous aurez un produit de qualité, plus les loyers seront élevés, plus les locataires en prendront soin, moins il y aura de travaux à réaliser.
Une situation gagnante pour les deux parties.
Quelques mots de fin
Pour résumer, créer un coliving et le mettre en location demande un investissement humain, matériel et financier plus conséquent qu’un achat locatif longue durée.
Il y a des “pour” et des “contres” sur lesquelles nous reviendrons bientôt, mais dans l’ensemble c’est un concept avec des rendements supérieurs à la moyenne (environ 10%) tout en participant à la création d’un projet qui va au-delà d’une mise en location.
Le plus dur étant de se lancer.